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Lettre ouverte – L’industrie du tabac ne sauve pas des vies

Le 14 décembre dernier, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a tapé du poing sur la table : « La cigaretteélectronique en tant que produit de consommation courante, ne s’est pas révélée efficace pour aider les fumeurs à arrêter de fumer. Au contraire, des données alarmantes prouvent son effet néfaste sur la santé de la population. », lit-on dans un communiqué. 

En résumé, ce que l’OMS nous dit c’est que le vapotage, tel qu’il est actuellement commercialisé, n’est ni un bon moyen pour arrêter de fumer, ni une alternative santé au tabagisme. 

 

L’institution dédiée à la santé des Nations unies tire la sonnette d’alarme et affirme que la vapoteuse n’est pas la solution miracle que l’industrie du tabac et du vapotage tente de faire croire au public à grand renfort de communication, d’articles scientifiques discutables et largement minoritaires, et de stratégies d’influences issues de leurs groupes de pression. 

 

Le vapotage est un chantage à la santé 

Fumer avec la peur de mourir ou vapoter sans trop s’inquiéter? C’est le message subliminal proposé par l’industrie du tabac et du vapotage. Un virage stratégique surprenant quand on sait que cette même industrie a passé des décennies à masquer et minimiser les méfaits de la cigarette comme l’a démontré le jugement du recours collectif CQTS-Blais.

La raison de ce revirement? La cigarette est nocive pour la santé et tout le monde le sait. Pourquoi alors ne pas utiliser ce levier pour remodeler le marché de la dépendance à la nicotine? Un marché en pleine expansion (on n’a qu’à penser aux pochettes de nicotine disponibles avec de multiples arômes, publicisés avec force par les compagnies de tabac) et ratissant large : les fumeurs, les anciens fumeurs, les non-fumeurs et parmi ces derniers principalement les adolescents et les jeunes adultes. C’est de cette façon que le vapotage est maintenant devenu l’avenir de la cigarette. C’est le plus grand tour de passe-passe commercial de ce début de siècle.  

 

L’industrie du tabac et du vapotage fait de sa faiblesse une nouvelle force. En s’appuyant sur une forme de chantage à la santé, elle prend les adultes fumeurs en otage de leur dépendance à la nicotine. Elles leur font miroiter un éventuel arrêt. Au mieux, ce qu’elle offre est une nouvelle dépendance à des produits dont on découvre année après année l’étendue des méfaits et le manque effarant de preuves concrètes quant à leur efficacité dans l’aide à l’arrêt tabagique. 

 

Le vapotage n’est pas une alternative santé au tabagisme 

Non, la vapoteuse n’est pas 95 % moins nocive que la cigarette comme l’affirment les vendeurs de nicotine. Ce pourcentage, issu d’une étude parue en 2014 continue d’être utilisé comme un argument « indiscutable ». Ce « fait scientifique » erroné a été tellement répété que l’on a fini par y croire. Pourtant, il est faux. 

En réalité, l’étude se limite à l’avis d’un petit groupe d’experts concédant leur manque de « compréhension des dangers potentiels » de la vapoteuse analysés « à un stade très précoce ». En résumé, il s’agit d’une étude faible, appuyée par des opinions prises à la hâte plutôt que sur des faits scientifiques évalués sur une période suffisante comme le soulignait la célèbre revue médicale britannique The Lancet dans son éditorial d’août 2015. 

 

Dix ans plus tard, l’OMS alerte sur les méfaits du vapotage sur la santé pulmonaire et cardiaque et conclut à son inefficacité dans le processus d’arrêt tabagique comme on le connaît actuellement. Ceci mérite d’être dit et gagnerait à être mieux connu.  

 

Ne confiez pas votre santé (et celles des enfants et des adolescents) à l’industrie du tabac 

Le vapotage tel qu’il est produit et commercialisé par l’industrie du tabac n’est pas une bonne solution pour arrêter de fumer et ne devrait jamais être essayé autrement que comme dernier recours et uniquement pour les adultes si toutes les ressources d’aides disponibles comme les thérapies de remplacement à la nicotine, les aides pharmacologiques ou le counseling ne fonctionnent pas. En général, il faut plusieurs tentatives pour arrêter de fumer. Les rechutes font partie du processus. Elles ne doivent pas être perçues comme des échecs, mais comme des étapes normales du chemin vers une vie sans fumée.  

 

Le vapotage des adultes est l’arbre qui cache la forêt. Cette industrie est avant tout destinée aux non-fumeurs et aux jeunes de moins de 25 ans tant et si bien que le gouvernement a mis en place un règlement spécialement dédié à rendre le vapotage moins attrayant auprès de cette jeune clientèle.  

 

Vapoter ou fumer, c’est toujours inhaler des substances nocives. La seule alternative santé est d’arrêter complètement, cigarettes et vapoteuses incluses. 

 

Vers qui se tourner pour sa santé? 

La réponse s’impose d’elle-même. Pour se protéger individuellement et collectivement, gardons en tête que l’industrie du tabac ne sauve pas des vies.  

 

Les cosignataires 

Annie Papageorgiou, directrice générale du Conseil Québécois sur le tabac et la santé 

Thomas Bastien, directeur général de l’Association pour la santé publique du Québec 

Stéphane Boudreau, directeur général adjoint du Réseau du sport étudiant du Québec 

Dominique Massie, directrice générale de l’Association pulmonaire du Québec